Pris sur Courrier des Afriques.
Kalamba Nsapo est Docteur en sciences théologiques de l’Université Catholique de Louvain en Belgique et Diplômé en Philosophie. Il a pour domaines de recherche : la théologie, l’anthropologie religieuse, l’interculturalité, les religions africaines, la sociologie, l’historiographie, les littératures africaines (Kasala). Il est chargé de recherches à l’Institut Universitaire Africain d’Etudes Prospectives dont le siège est à Kinshasa. Il est également Professeur et Doyen de la faculté d’Etudes Interculturelles de Bruxelles en Belgique et Professeur à l’Université Per Ankh de la Renaissance de Paris en France. Interview avec un spécialiste de la théologie et de l’Interculturalité au sujet de son nouvel ouvrage.
Professeur Kalamba Nsapo, vous venez de publier un livre aux Editions Cheikh Anta Diop de Douala au Cameroun qui est intitulé « Louange à l’action créatrice du soleil ». Pourquoi un tel livre pour commencer ?
Mes activités de recherche m’ont amené à prendre la mesure de la sublimité, de la profondeur, de l’actualité et de la pertinence du grand hymne d’Akhénaton. J’ai décidé d’en faire le partage avec la communauté des kamites.
Il s’agit de théologie comme on peut s’en rendre compte. Mais que développez-vous dans cet ouvrage ?
Je mène une étude théologique à la lumière de certaines conceptions majeures du grand hymne d’Akhénaton, dont les suivantes :
- l’idée de l’existence, de la bonté, de l’excellence de l’Unique Créateur; celle de la présence du Créateur dans la culture humaine et l’histoire;
- l’exigence de vivre selon l’esprit de la Maat (vérité-justice-rectitude-bien) et de rendre service au «prochain»;
- la conception de la fraternité universelle et de l’égalité foncière entre les humains dont la différence et la multiplicité demeurent constitutives de leur être;
- l’attention du Créateur à la cause des faibles et des petits face à la violence des grands et des puissants;
- la vision universaliste de l’histoire ;
- la place centrale et récapitulatrice de la nature.
Qu’y a-t-il de nouveau ou de spécifique comme thématique ou aspect théologique que vous avez eu besoin de remettre à la lumière, pour ainsi s’exprimer?
A ce propos, je peux me limiter à deux points pour répondre à votre question. Le grand hymne permet de mettre en lumière le mono-originisme qui consiste à dire que tout ce qui existe et n’existe pas encore a une seule et une même origine. Celui-ci ne peut être confondu avec le monothéisme. En épiloguant sur le monothéisme, la théologie conventionnelle ne se gêne pas d’établir un rapport d’opposition avec le polythéisme (ou la multiplicité des dieux). Mais la pensée mono-originiste ne peut opposer le Créateur à ses créatures. Elle intègre l’idée selon laquelle les dieux sont des créatures. On ne peut les opposer à leur Créateur.
Evoquons un autre élément spécifique majeur en parlant de ce sur quoi repose l’excellence du Créateur ? Il ne s’agit pas de l’élection d’un peuple au détriment des nations dites païennes.
Le Créateur n’est pas Bon parce qu’il a choisi (élection) Kame (Égypte) ou Kash/Koshi/Kush (Nubie ou Soudan) comme son temple sur la Terre. Son excellence n’est pas dérivée du service qu’il rend aux Kame et à leur territoire, mais elle résulte plutôt du service rendu aux autres Nations. C’est la façon dont il s’occupe des pays les plus lointains qui manifeste l’excellence, la perfection de son action créatrice et vivificatrice:
Tous les pays les plus lointains, tu les fais vivre,
Tu leur as donné un Nil qui déborde du ciel
Pour descendre sur eux,
Battre les coteaux de ses ondées
Et arroser leurs champs entre leurs villages.
Combien excellents tes desseins,
O maître de l’éternité!».
À la lumière du texte qu’on vient de lire, on constate que Celui qui a créé dans sa grande bonté veut que même les étrangers jouissent des bienfaits du Nil:
«Le Nil dans le ciel, tu l’as mis pour les étrangers
Et leurs bêtes de toute terre étrangère,
Qui marchent sur leurs pieds».
En quoi il est-il important pour les Africains de revisiter la théologie africaine ?
La théologie africaine – antique – permet notamment de restituer la vérité historique et théologique, de renouer avec ses racines spirituelles. La théologie africaine n’en demeure pas moins une base de libération mentale et un catalyseur des consciences au moment où l’on a conscience d’être confronté aux grands défis.
Docteur Kalamba Nsapo, à quel public votre ouvrage est essentiellement destiné ?
Mon livre s’adresse à plus de 40 millions de kamites usagers de la langue ciluba et à tous les kamites qui savent mesurer l’importance de la promotion des langues négro-africaines.
L’ouvrage « Louange à l’action créatrice du soleil » est paru à Douala au Cameroun. Pourriez-vous nous dire où il est disponible hormis le Cameroun et à combien est-il vendu?
Je vous invite à commander mon nouveau livre sur internet (voir le site de la Société Savante C.A.Diop : http://www.ss-cad.org). Vous pouvez aussi contacter le professeur MEVAA ABOMO à l’adresse suivante : mevaa_abomo@ss-cad.org
Si vous avez un message à passer, ce serait lequel ?
Je souhaite que tous les kamites fassent du grand hymne d’Akhénaton un sujet de méditation et de réflexion. J’aimerais qu’ils le traduisent dans leurs langues maternelles, le méditent tous les jours et se rendent compte, comme moi, de la sublimité de cette érudition spectaculaire. Leur spiritualité en bénéficiera. Et leur route vers le progrès total s’en trouvera éclairé. C’est ma conviction.
Interview réalisée par Tcha Sakarao
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